Il est 4 heures et la sirène retenti dans le couloir de l’immeuble. Je vis, ici, assignée à résidence après que l’on ait appris que j’avais eu autrefois ma carte du parti communiste, que j’écrivais des textes subversifs, que mon arrière grand-père aimait bien boire un petit rhum de temps en temps et que mon ADN a révélé mes origines raciales. Il paraît que je suis encore une privilégiée puisque je travaille dans le "luxe" qui sied si bien à notre empereur. J’ouvre la porte sur le couloir immonde où la saleté et la puanteur sont devenues partie intégrante du décor de ce foyer pour travailleurs sous surveillance.
Allons, il est temps de se mettre en route, le chemin est long jusqu’à la manufacture ! Les roues de mon vélo gémissent à chaque coup de pédale, il faudrait que je les change ! En fait, c’est mon vélo qu’il faudrait que je change ! Mais mon salaire me permet tout juste de payer ma cellule, dans ce vieux bâtiment qui abritait autrefois la caisse d’assurance maladie, ainsi que les deux baguettes et le litre de lait auquel nous avons droit chaque jour.
Que de souvenirs ! les longues heures d’attente dans les bureaux de la "sécu" comme on l’appelait alors… elle n’existe plus depuis déjà 5 ans, tout comme EDF, l’Assistance Publique, l’éducation nationale, la SNCF ! Depuis le grand remaniement en fait. Tout est désormais géré par les clones de l’empereur.
Je me souviens, tout a commencé il y a 20 ans, en mai 2007. Comme le temps passe ! A cette époque là nous avions encore le droit de vote et 53 % des français avaient fait le choix de ce candidat qui leur semblait si prometteur tant il était peu avare de promesses ! Le pouvoir d’achat, les retraites, les salaires allaient augmenter et nous, le peuple souverain serions enfin entendus et compris par un président qui voulait rendre à la France son lustre d’autrefois ! Comment ont-ils pu y croire ? Je ne le sais toujours pas aujourd’hui mais, qu’importe, tout ceci n’existe plus maintenant.
Après qu’aux élections municipales en 2008, mes concitoyens aient encore prêté l’oreille aux sondages et aux chaînes de télévision, aux chants des sirènes et aux promesses, en élisant les membres du parti du président, la France est devenue un empire.
En effet, dès 2009, la constitution a été abrogée et le président a décidé que le pays n’avait plus besoin d’élections ni de partis politiques et que désormais seule l’UMP devenue pour ce faire "Union Manichéenne Permanente", était apte, à travers lui, à décider pour le peuple… Et, pour faire plaisir à sa dixième épouse, danseuse vedette au Crazy-Nude-Dancers, il a fait de Versailles, la résidence impériale.
La presse avait bien essayé de rattraper ses errements en dénonçant la dérive people d’un président instable et "m’as-tu-vu" recadrant ses propos mégalomanes et stigmatisant son comportement schizophrène mais il était trop tard.
Aujourd’hui, nous travaillons 12 heures par jour, 364 jours par an. Le seul jour férié de l’année est le jour anniversaire du sacre de l’empereur, le 6 mai. L’âge de la retraite a été porté à 90 ans et limitée à une seule retraite par foyer. Il n’y a plus de service public et les délégations de clones gèrent les cantines, les hôpitaux, les centres de soins, les écoles, les universités, les medias. Les fonctionnaires d’hier sont devenus des parias et travaillent le plus souvent sur les chantiers, les incinérateurs, les centres de tri de déchets radio-actifs, en tant que balayeurs de rues ou à la manufacture impériale de montres, bijoux et portables pour un salaire de 500 euros mensuels.
Il n’y a plus d’essence que pour les véhicules officiels. Le peuple marche ou roule à vélo. Voilà pourquoi, en ce froid petit matin, j’enfourche ma vieille bicyclette pour, malgré mon âge (73 ans en juillet prochain), parcourir les 40 kilomètres qui me séparent de mon poste de travail où, jusqu’à 22heures, je vais sertir des brillants sur les cadrans de montres que le président aime à offrir à ses visiteurs.
Récemment, il en a offert une au président Chinois pour le remercier de délocaliser ses usines sur le territoire impérial de Sarkozie.
J’entends toujours la sirène… c’est curieux pourquoi continue –t-elle de hululer ainsi ? ? ?
Aurais-je oublié d’apposer mes empreintes sur le compteur bio-métrique de sortie ?
Non pourtant… je ne comprends pas !
Assez !
Hoouhoouhoou…
Ou ma tête oui ! Non monsieur le clone policier je n’ai rien fait de mal… ne me secouez pas ainsi ! une femme de mon âge… Hoouhoouhoou…
Maman ? Maman ? ! Tu t’es endormie, il y a déjà 5 bonnes minutes que le réveil sonne !
O nom de D… ! tout ça n’était donc qu’un cauchemar ? OUF ! quel soulagement…
Mais pour combien de temps ? ? ?
mardi 12 février 2008
Petite fable en forme de ...
Libellés : elections municipales, Humeur politique, UMP